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Compte-rendu N°20

lecture du séminaire du 23 novembre 1965 pages 183 à187


Groupe de lecture de décembre 2013 « Séminaire de Zurich » Martin Heidegger

Présents : Edith BLANQUET – Marie Christine MISTRAL – Marie SARDA - Guy MINAUDIER – Denis TOUZET

Ce soir nous nous sommes attaqués à la lecture du séminaire du 23 novembre 1965 - En page 183 de l’ouvrage : « Séminaires de Zurich » de Martin HEIDEGGER traduit par Caroline GROS – éditions Gallimard bibliothèque de philosophie.

D’emblée M. Heidegger interroge : Pourquoi dans : « Etre et temps » est-il question du Dasein et non de l’être de l’humain ?

On ne peut dissocier être et temps, le temps est compris à partir de la présence d’être. Chez ARISTOTE le temps présuppose la question de l’être. L’être est compris comme la présence du maintenant, ce qui implique alors que pour comprendre le temps il faut que l’être lui soit donné ; autrement dit il faut que temps il y ait . Cela ne questionne donc pas l’être à partir du temps, mais cela questionne le temps à partir de l’être ; on ne se pose pas , chez Aristote, la question de l’être ; on se pose la question du temps. Pour Heidegger, le propre de : « Etre et Temps » est de parvenir à trouver une manière de se poser la question de l’être lui même et non pas l’être comme quelque chose de présupposé dans quelque chose d’autre. Car alors l’être est toujours présupposé ou déjà compris à la manière de ce qui nous est évident. Le projet, ici, est de prendre un étant particulier – l’être humain- car il est le seul étant à se poser la question de qui il est ? Et en cela il peut nous amener à la question de ETRE . Heidegger nous suggère ici que lorsque nous questionnons l’être en tant que ETRE on ne doit pas le prendre dans l’horizon d’un étant mais dans ETRE seul, à partir de lui-même et non par un biais. La question alors est : dans qu’elle mesure l’être a à voir avec le temps ? ? Question que l’on peut formuler ainsi : Comment l’être, l’état de présence, la possibilité de présence à … se manifeste-t-elle dans le temps ? Puisque la présence implique le temps, on essaie donc de voir quel est le rapport d’être et de temps et non pas le temps de quelque chose. Pour cela, on va interroger la manière dont l’être humain fait l’expérience d’être et de temps, puisque l’être humain entend l’être, c’est à dire qu’il a toujours à voir avec la question de être puisqu’il se pose toujours la question de qui il est ; et dans ce sens il est ouvert à l’être et c’est pour cela que Heidegger va le définir comme le Dasein, comme celui qui est ouvert à la question de l’être. Dasein : être-le- là.. on ne cherche pas ici une anthropologie ; on cherche à définir qui est l’homme.

« Le temps est compris à partir de l’être au sens de la présence du maintenant » … Qu’entend-on par la présence du maintenant ? La présence du maintenant,c’est quelque chose qui est là présent maintenant , par exemple le temps pour lire un livre ou le temps pour toute autre activité d’un humain Je définis ainsi , non pas le temps, mais la durée d’une présence ..et je ne définis pas l’ÊTRE du temps.. je ne fais que définir le temps d’un objet ou d’un étant . Si je veux définir le temps, il me faut questionner le temps lui-même et non le temps qui dit la façon dont un humain s’occupe. C’est un peu comme si je voulais définir le monde par les objets qu’il contient .. je vais alors définir les objets mais je rate toujours le monde lui-même puisque je ne définis pas le monde à partir de lui-même mais à partir d’objets qu’il contient et de là je présuppose sans le prendre en vue lui-même le monde.

Question amorcée d’un membre du groupe : peut-on définir une chose à partir d’elle même ? Réponse : oui nous pouvons définir une chose à partir d’elle même : exemple : le temps tempore … le monde monde ..et alors en quelle façon cela explicite-t-il ? N’est ce pas tautologie ?

Le monde est un pouvoir être – un pouvoir être « mondain » pour un existant. Ce n’est pas un contenant, c’est une possibilité d’être pour un humain : être-au-monde, être-avec-autrui. C’est le caractère d’être pour un humain, ce n’est pas une capacité pour un étant à l’intérieur de lui-même.. de ce point de vue là le Dasein n’est pas dans l’espace , il est spatial, il ouvre l’espace car, comme il a ouverture à être , il est ouvert pour …. Cela le traverse « au-delà » de lui . C’est ainsi que Heidegger le nomme « ex-istant » pour dire celui qui n’a pas de lieu dans lequel il se trouve, qui est en rapport à, hors-de dans le sens de toujours auprès de.

Heidegger insiste sur le fait que toute l’histoire de la philosophie s’est attaché à définir l’être de quelque chose mais elle a toujours « raté » la question de l’être lui-même, et cela parce que l’être a pour caractère d’être de « s’oublier ». c’est là sa manière de se montrer… on ne peut pas l’attraper. il est toujours en retrait .. il est condition de possibilité de quoi que ce soit .. et Heidegger va donner une définition qui ne le ramène pas à un étant : être, une question : être ?

Puis Heidegger interroge : Comment est-ce possible - et sur quoi peut on fonder une telle idée - que l’être humain ait une certaine entente de l’être , entente qui est toujours déjà là , mais qu’il ne peut jamais énoncer et attraper ? Il en dit quelque chose, cela le concerne mais il ne peut rien en dire de précis puisque dés qu’il en dit, il le rate .. la question est donc : en quoi tient cette possibilité d’entendre l’être ou que l’être humain soit interpellé par l’être ? Comment l’être peut-il, se montrer, se manifester pour l’être humain, dans le sens de la présence même.. la présence étant : « être à l’avant de .. » ce n’est pas la présence subsistance d’une boite de sardines à l’huile d’olive pure bien évidemment ! Nous avons une certaine entented’être et cette entente n’est pas de l’ordre de la raison ...Cela nous concerne tous. D’évidence on sait de quoi il s’agit et cependant personne ne peut le dire , personne ne l’a clairement raisonné, maîtrisé, calculé ; on ne l’a jamais attrapé comme on a disséqué une souris et quand bien même on dissèque une souris, est ce l’être de la souris que l’on attrape ? On a attrapé des morceaux de souris mais certainement pas l’être de la souris.

« Une question se soulève à présent : Comment faut-il envisager l’être humain pour que sa détermination d’être humain corresponde au phénomène fondamental de la manifesteté de l’être ? » Si on pose la question de l’être et que l’on essaie de déterminer non pas l’être de quelque chose (c’est à dire la manière dont un humain est toujours déjà, à savoir une anthropologie) il nous faut réfléchir à notre façon de penser l’être humain. Comment doit-on l’envisager pour que sa manière d’ être humain corresponde à la question de l’être – au phénomène fondamental de l’être - c a d que notre interrogation ne porte pas que sur l’être de cet humain là et qu’on puisse atteindre la question de l’être par l’intermédiaire de cet étant là que nous appelons couramment « être » humain (nous voyons là comment la question de être est assimilée à celle de l’étant dans notre quotidien : nous employons comme synonymes être et étant). Il nous faut donc le penser d’une manière particulière . Heidegger pose donc ces questions : en quoi l’être humain a à voir avec l’être ? Est-ce que la manière dont on pense l’être humain habituellement nous permet de prendre soin de cette question ? Heidegger propose qu’il y ait une manière d’entendre l’être en tant que être ; non pas l’être d’un étant. On pourrait vulgariser cette interrogation par la formule suivante : Vous avez une idée évidente (un apriori) de l’être humain, arrêtons nous dessus et essayons de voir de quoi on parle ? et alors en procédant ainsi , est-ce qu’on saisit l’être ou est-ce qu’on saisit un étant ? Exemple : si je définis la vie comme la pulsation cardiaque,est ce que ainsi je définis « la vie » ? Comment définir la « vie » et elle même ? .. je ne vais définir que la pulsation cardiaque et ce que l’on sait , c’est que la vie se montre entre autre , comme pulsation cardiaque, Mais essentiellement il y a cela , si le cœur ne bat plus il n’y a plus de vivant et cependant je ne peux pas réduire la vie au cœur qui bat parce que un cœur qui bat « mécaniquement » ce n’est pas un vivant, donc : qu’est-ce que la vie par elle même ? Car quand je dis :le cœur qui bat = la vie , je dis par où peut se montrer la vie mais je n’attrape pas la vie elle-même ; je définis alors la vie par l’intermédiaire du cœur qui bat et alors je ne parle que de la fonction du cœur et pas de la vie – et c’est cela la question de l’être d’un étant : la manière dont être se montre et s’oublie dans l’étant .

« D’où vient ce regard qui permet de voir que l’être humain lui-même se tient dans l’éclaircie de l’être, ce qui veut dire que l’être-le-là (Dasein) est ekstatique, que l’être humain existe en tant que Da-sein ? »

La possibilité d’être-le-là, elle est hors de … ex-tatique Pour que l’être humain se tienne dans l’éclaircie de l’être , cela veut dire que l’être humain trouve sa place dans l’éclaircie, c a d dans quelque chose qui s’ouvre dans l’ouverture de l’être.. donc il tient sa place hors de lui... puisque l’être humain n’est pas l’être, qu’il est un étant, une manière d’être, donc l’être humain tient son essence -sa place-dans l’éclaircie de quelque chose qui n’est pas lui .. l’être du « là » est hors de lui. La possibilité de trouver sa place n’est pas à l’intérieur de lui ; il y a quelque chose qui le dépasse, ce n’est pas en lui. L’être ne peut pas être « enfermé » dans l’être humain, toujours il échappe. Donc l’être humain existe en tant que Da-sein, il est ouverture pour... être lui-même (c’est à dire le devenir sans cesse...petit clin d’oeil qui nous fait entendre la question du temps) et cette ouverture est existence : hors de... ou Da-sein .Être-le -à c’est une autre manière de parler de l’humain , ce n’est plus un animal avec la raison en plus , c’est une manière d’être, ce n’est pas les capacités d’un étant.

Puis Heidegger nous dit que les structures principales qui constituent l’être tel qu’on l’envisage, c’est exister ; l’exister propre à un Da-sein Il définit en fait ce qu’est « entendre l’être ». Entendre l’être pour un humain, c’est exister – avoir une ouverture à être – il dit que entendre ce n’est pas avec les oreilles mais bien la manière dont on entend, dont on y comprend quelque chose – ça nous concerne et ceci tant que nous existons. On est toujours en rapport à être – ouverture à .. L’exister c’est quelque chose d’essentiel et là est l’analytique existentiale du Da-sein et cette analytique va expliciter exister. Existentiale veut dire autre chose que catégoriale.

Qu’est-ce que catégorie ??? dans la philo de base , catégories = grandes « familles ». Quand on parle de catégorie, on parle de l’être d’un étant, de comment quelque chose participe de l’être, à quelle famille il appartient, à quelle manière d’être, alors que existential ça ne veut parler que de l’être de l’exister, l’exister de l’être en tant que être mais pas l’être d’un étant . Comme la philo, l’être humain essaie de connaître le monde, il a pour cela découpé le monde en régions, donc des régions d’être. Ce que l’on appelle « région » ou « domaine » cela indique des façons d’être : être minéral plutôt que végétal etc. Il y a donc des manières d’être animal et des manières d’être objet . Dans la grande famille des objets , il y a les trousses, les verres etc qui ne se classent pas au même endroit car ils ne se « caractérisent pas de la même manière », ils n’actualisent pas les mêmes « caractères d’être ». Dans la famille des vivants il y a les oiseaux, les mammifères les reptiles... des familles et des sous familles tout cela constitue les catégories, cela permet de distinguer, de connaître, de classer.

Puis il passe de « catégories » à « Dire » Catégorie vient d’un verbe grec qui veut dire étymologiquement : « qui se réfère à l’agora », l’agora étant la place publique , donc en grec (au départ) catégorie s’enracine dans une manière de dire – un dire qui devient public--- c’est déjà une manière de dire – dire ce n’est peut être pas simplement énoncer ..peut-être dire c’est montrer ? Dire = rendre public quelque chose.. Il commence donc à ouvrir la question du Logos. Cataloguia – catalogue : il y a des catégories , des robes,des chaussures dans le « catalogue » de la Redoute . Un catalogue c’est un ensemble de catégories, quelque chose qui donne à voir des catégories, des choses énoncées mais selon un certain classement , choses qui sont énoncées selon « la table des catégories d’Aristote » Pour cataloguer - dire sur la place publique – il faut lier les choses selon la table des catégories de Aristote ( que l’on retrouve chez Kant avec la table des jugements). Heidegger nous dit : Chez Aristote « Cataloguia reçoit la signification de visée, toutes ces déterminations qui font partie de l’énoncé en tant que tel. » Énoncer quelque quelque chose, mettre sur la place publique, c’est donc viser - déterminer - faire apparaître quelque chose. Et c’est pour cela que dans le travail thérapeutique, quand je dis ça ..à la place de .. plutôt que … je travaille sur cette dimension , car le « comment dire » nous donne à entendre ça plutôt qu’autre chose .. ça vise ça .. à la place de .. sur le fond de .. en vue de … et c’est une manière de montrer, de rendre présent ce qui est énoncé à propos d’un énoncé et ce faisant, à propos de soi-même.( ainsi nous pourrions méditer ce que cela veut dire s’orienter à partir de la théorie du self : est ce identifier/aliéner quelque chose ou bien se donner à voir ainsi/ autrement ?) Exemple : cette table est constituée d’un plateau en bois et de 4 pieds. Elle est constituée de cette façon là et une autre table pourrait n’avoir qu’un pied. Celle-ci a un plateau en bois rond et 4 pieds, celle-là a un plateau en bois carré et 4 pieds .. je dis quelque chose , la constitution c’est la catégorie de la qualité, ça se constitue ainsi : un plateau en bois, qualité en bois qualité rond, l’autre carré, combien ? 4 pieds Je pourrai dire : elle mesure tant de cm de hauteur et elle a telle largeur. Le combien -hauteur et largeur- est nommé par la catégorie de la quantité ;; tant de cm et tant de pieds. Toutefois,il existe un « glissement » de Aristote à Kant. Aristote : définit les catégories pour dire l’être de l’étant en tant que tel. Kant définit les catégories pour dire les facultés de l’entendement humain - Cela déplace le fondement , le sujet. Chez Aristote le sujet est l’être de l’étant en tant que tel , on vise ce qui se montre en tant que tel. Alors que chez Kant on vise ce qui se montre tel qu’ il est pensé par l’entendement : la faculté d’un humain. Le sujet , la subjectivité humaine, est devenu le lieu de tout, alors que le sujet ( et nous voyons que dans le langage courant dire « sujet » est d’évidence compris comme un « je ») n’était juste que celui qui accueillait une présence, il devient avec Kant celui qui énonce. Chez Aristote le sujet fondamental ce n’est pas l’être humain sujet-je d’une conscience ; Chez Kant le sujet est d’évidence assimilé à une conscience, dont Kant va différencier les catégories : celles qui sont de la raison pure , et celles qui sont de l ’expérience empirique et il va re- déterminer les catégories dans 4 grandes rubriques :Quantité-Qualité-Relation et la Modalité ; 4 rubriques qui sont des manières de penser pures. Ce sont ces conditions à priori qui sont requises pour que l’objet soit pensable, c a d ce sont des conditions que l’on ne peut pas déduire de l’expérience. Ce sont des conditions que l’on suppose a priori pour penser .. ce sont des règles pour penser et ces règles ne sont pas des règles issues de l’expérience, c’est à dire à posteriori , ce sont des postulats de la raison .. C’est cela la raison « pure » , raison qui n’est pas altérée par l’expérience, alors que chez Aristote, dans les catégories, il y a des choses qui sont liées à la sensibilité et la sensibilité n’est pas de l’ordre de la catégorie de l’entendement pur. Aussi Kant va reprocher à Aristote de confondre entendement et sensibilité. Chez Kant, on fait la différence entre raison et passion et chez Aristote ce sont des façons d’être d’un étant. Chez Kant, la raison est au fondement de la passion.. on différencie donc sujet et objet, l’objectivité étant le « pur penser », ce qui n’est pas altéré par les catégories de la subjectivité . La sensibilité est perçue comme altérant la raison. La vérité a donc changé de lieu, vérité comme manifestation devient vérité comme adéquation entre un énoncé et une chose .. « il n’y a d’objet que pour un sujet qui le pose ».

« Dans ETRE et TEMPS, j’ai tenté de mettre au jour les caractéristiques d’être spécifiques du Dasein en tant que Dasein face …. » La manière d’être ... le caractère d’être .. la façon dont l’être se caractérise comme Dasein est très différente de la façon dont la nature se caractérise. La manière dont l’humain se caractérise dans son être , c’est Dasein, avoir ouverture à la question de l’être. Alors que la nature ne se rapporte pas à la question de l’être de cette manière là, propre au Dasein, à l’humain en tant que celui qui existe. La nature n’est pas existentiale puisque justement ce qui caractérise l’être à la mesure du Dasein ce sont les existentiaux - existentiaux = caractères d’être spécifiques du Dasein et les existentiels sont les caractères d’être spécifique d’un étant , ce n’est pas le caractère d’être.

Existentiel chez Sartre ;, ça nous concerne nous , comment nous sommes dans le quotidien ExistentiAl chez Heidegger ça concerne l’être .

« L’analytique du Dasein en tant qu’existentiale est, pour le dire de façon tout à fait formelle, un type d’ontologie. » Heidegger conteste ici la position de Binswanger. « Être et temps » ne peut pas être traduit du côté de la quotidienneté, ce n’est pas une anthropologie, cet écrit ne peut être traduit que comme une question que l’on se pose. « Être et temps » se définit comme une « ontologie » fondamentale, car il vise à la question de l’être en tant qu’être, et les existentiaux sont du ressort de la question de l’être et non de l’ordre de la quotidienneté. Les catégories parlent de la quotidienneté : la manière d’être au quotidien : la forme d’une présence : un étant. Quand on va chercher le thème de l’existence, on va chercher la question « ontologique » ( ontologie : être ; ontique : étant), on va chercher en quoi nous taraude cette question de l’existence, de qu’elle manière ça nous ouvre à la question de l’être. Cela témoigne d’une tension , d’une intensité et la façon dont nous y répondons relève de l’ontique, notre comportement témoignant d’une tension/ affection : une manière d’avoir lieu et donc d’avoir déjà pris « forme » : une manière d’être ; une tournure. .Heidegger précise ainsi sa différence d’avec Binswanger ; l’analytique existentiale qui se réfère à Heidegger étant différente de l’analytique du Dasein qui ,elle, se réfère à Binswanger.

« Si l’on vous disait que votre pensée est hostile à la science, que répliqueriez-vous ? Réponse : il faudrait demander à l’objecteur ce qu’il entend par science. » Heidegger laisse entendre que cette formulation présuppose que d’évidence on ait déjà compris ce que « science » veut dire, et pour lui il convient de se hâter de ne pas avoir compris, prendre le temps de se laisser concerner, se laisser étonner , ne pas répondre d’évidence. Et cela ne nous parle-t-il pas de notre posture en tant que Gestalt-thérapeute ?

« Toute science est fondée sur une ontologie implicite de la région de son objet. » Si je dis : c’est un animal, je dis alors que cet animal, c’est une manière d’être (ontologie) implicite de cette région là (région animale) c a d région « vivant » plutôt que « non vivant ».

Edith rappelle que nous faisons toujours cette confusion : Quand nous disons « mon être propre .. est dans mon être, nous ne parlons pas là de l’être mais nous parlons de l’étant. S’ensuit alors une discussion : que peut -on entendre par :Être de la manière d’être ??? C’est la région être de l’étant. Si je dis : une souris.. cela présuppose un être vivant plutôt qu’un être inerte mais être vivant et être inerte sont deux manières d’être . Ce sont des régions de l’être dans laquelle l’Etre ? Est oublié et nous retenons la façon dont il a pris forme : une souris. Pour que souris il y ait, elle doit bien avoir reçu le pouvoir « d’être » ...pour être ainsi elle à reçu la possibilité d’y être, d’être.... .

« La physique,par exemple, traite du mouvement du corps physique en tant que quelque chose de mesurable. La pensées physique est une pensée « calculante » ( rendre raison = rendre compte, justifier). La physique (une région) traite de son objet (le mouvement du corps physique) en tant que quelque chose qu’on peut mesurer. Elle a donc déjà préalablement défini « être » : il y a là une ontologie implicite : l’être d’un corps ou l’être du mouvement, c’est la mesure … et on ne peut accéder à cet être que par la mesure. Le présupposé se tient là, et ce présupposé exclut le fait que l’on puisse faire le tour ou le contour de cet objet autrement que par la mesure. Cela signifie que l’on a déjà une idée, une définition a priori de être : être c’est pouvoir mesurer que l’on ne questionne pas . D ’évidence le mouvement, c’est la mesure de la distance parcourue entre un point A et un point B. Le mouvement = distance parcourue ; alors que « se mouvoir » pour un humain c’est peut-être tout à fait autre chose ? On confond le geste et la translation métrique d’un lieu à un autre. Heidegger ouvre cette dimension que pour un humain , un geste ne se résume pas simplement à un déplacement. Cela nous invite à nous demander ec que veut dire « corps » pour un existant...et comment nous, Gestalt-thérapeute avons toujours présupposé ce que corps signifie, ce qu’émotion signifie...

Puis Heidegger revient sur les débuts de la philosophie qui posait la question de l’étant en tant qu’étant .Qu’est ce que cela signifie ?? A ses débuts, la philosophie se posait la question : qu’est ce que la structure d’une trousse , d’un humain, d’un cheval ? Ou encore qu’est ce que l’essence de ce cheval , cet humain etc La philosophie s’intéressait alors à la manière d’être de ces différents étants. Ou bien, formulé autrement, comment ce cheval ou cet humain participe de l’étant, en quelle façon se montre-t-il ? La philosophie se proposait alors de nommer les étants après avoir déterminé comment ils se montrent ou comment ils sont faits. Heidegger restitue donc la question.

Pensant à la loi de gravitation de Newton selon laquelle , si aucune force ne s’exerce sur un corps celui-ci « persévère à ne pas bouger » Heidegger affirme que la notion de mouvement uniforme et linéaire n’est qu’un apriori , un peu comme l’est le mètre étalon. Car quand l’on affirme que telle chose mesure tant de centimètres, on n’affirme qu’eu égard à une fiction qu’est le mètre étalon (objet précieusement enfermé dans un endroit précis pour qu’il ne s’altère pas – ce qui n’est d’ailleurs pas le cas). Cet apriori ne nous dit rien de la chose elle-même, il nous dit juste que nous avons tenter de la maîtriser. La physique du mouvement se fonde sur l’idée de « comment doit être le mouvement ». Elle a déjà une idée de l’être du mouvement, idée à laquelle elle a déjà répondu sans même en prendre conscience. Pour la physique , le mouvement = mesurable. Une présence serait donc mesurable . Pour la physique , une absence ne peut pas se concevoir comme forme de présence, alors que pour le Dasein, l’absence est justement une forme particulière de présence. Je peux être présent à quelqu’un sans que j’y sois présent matériellement ( je peux imaginer, me souvenir..). C’est absolument impossible pour la physique. C’est faux scientifiquement parlant, c’est vrai humainement. Le « rendre présent » n’est pas la matérialité de quelque chose et nous sommes pris dans ces présupposés.

Heidegger poursuit en disant : « L’exactitude des sciences exactes ne peut être déterminée exactement » Ce que nous disons « vrai » n’est pas la vérité de la science mais la mise en oeuvre d’une idée de l’exactitude dont le présupposé ontologique n’est pas questionné. Quand nous vérifions une chose par le biais du raisonnement scientifique, nous ne vérifions rien d’une « réalité », car le raisonnement scientifique ne vérifie que ses propres supposés théoriques. Et Heidegger de préciser : « C’est pourquoi je résiste à la science, non pas à la science en tant que science, mais à l’absolutisation de la science de la nature. »

Puis Heidegger répondant à un participant qui craint de voir « Bannir » la pensée scientifique de la psychologie quand lui-même aspire à rester scientifique : il lui propose d’être présent en tant que Dasein, précisant : Quand je suis là à parler avec vous, « il y va de vous pour moi et de moi pour vous » .. Je suis là et il y va de moi et ce n’est que là que l’on peut exister l’un l’autre avant d’être l’un à l’autre. Vous me voyez et je suis présent pour vous dans l’horizon des déterminations analytiques du Dasein.. C’est le :être-avec … être-avec, et les modalités du être-avec .. s’en étonner .

Un comportement, une manière de s’actualiser, n’est pas une question ontologique .. c’est une manière de prendre en charge ;; ; je suis toujours déjà là ; c’est le niveau ontique et une fois de plus : L’analytique du Dasein réfère à Heidegger l’analyse du Dasein réfère à Binswanger, quand il veut appliquer à la quotidienneté les « structures » d’être, les existentiaux. La quotidienneté est toujours singulière et de ce fait on ne peut lui appliquer les existentianx, car la quotidienneté c’est toujours quelqu’un qui est là maintenant, c’est donc une particularité de l’expérience qui ne peut pas être ramenée à l’analytique existentiale qui, elle, est toujours une manière de questionner. L’analytique du Dasein ne répond jamais rien, ou plutôt elle répond des questions. 1 Puis Heidegger se propose d’interroger l’interprétation des rêves de l’analysant relativement à ce qu’il est comme cet humain-ci qui existe (analyse du Dasein) mais en élargissant l’analyse jusqu’à se demander ce qu’est le rêve en général. Le rêve comme pouvoir être du rêveur. Que nous dit ce pouvoir être là, de la présence ??(question qui se réfère à l’analyse existentiale) . Par cet énoncé Heidegger passe là de l’analyse du Dasein ( cet homme-ci qui rêve) à l’analytique existentiale (le pouvoir être ..) Le rêve n’est pas une qualité d’étant particulier qui a la capacité mentale de rêver, c’est un pouvoir être : une possibilité d’être. Que signifie alors « pouvoir être » ? ; qu’est-ce que « pouvoir être » vient questionner de la présence ?? Cela nous amène à penser que la présence n’est pas forcément une présence matérielle. Heidegger nous fait ici sortir du calcul, il ouvre tout ce mystère de la présence. Quand on se questionne sur le pouvoir être , sur le rêve en général, on se questionne sur : comment l’être humain a ouverture ? Comment l’être humain se tient dans l’éclaircie d’être ? Ce pouvoir être, de manière inouïe, impensable, rêvante est autre chose encore que ce pouvoir être mourant qui est encore autre chose que ce pouvoir être mangeant etc .. Ceci nous ouvre donc à toute une dimension qui nous dépasse, qui est au delà de nous un EX...ister Ceci, à l’inverse de la méthode du physicien Heisenberg qui lui se contente d’utiliser la causalité comme une évidence, sans se questionner sur comment il peut prétendre cette causalité, ni sur quoi il s’appuie pour prétendre celle-ci. Un symptôme est interprété par l’analyste à partir du présupposé de l’analyste selon lequel quelque chose est caché derrière ce symptôme. Le phénomène lui, est tourné vers ce qui va venir ensuite , ce qui se déploie sans cesse. Le phénomène est proche de la notion de forme des Gestalt-thérapeutes qui n’est pas celle d’un objet : la forme ne dit pas l’objet tout comme le concept est encore autre que la forme... Tout ce qui se manifeste ne peut pas être ramené à un existential qui serait traduit, il faut le reprendre comme une question qui nous concerne l’un l’autre, une même question pour laquelle la réponse ne sera pas identique. La réponse sera toujours singulière. Le même n’est pas l’identique. Nous sommes existants et nous n’avons pas des manières identiques de nous confronter à ces questions là.


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