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Compte rendu N°15 d’un entretien de la parole

lecture pages 123 à125


Compte-rendu 15 - Corinne Simon, Frédérique Remaud, Marie-Christine Chartier, Edith Blanquet - septembre 2020 - St Salvy - pp. 123-125

J. - Vous employez donc, dans votre titre, le mot « phénomène » au sens grec ? D. - Oui et non. Oui, dans la mesure où pour moi le nom de « phénomène » ne nomme pas les objets en tant qu’objets, et encore moins ces derniers comme objets de la conscience, ce qui veut toujours dire de la conscience-de-soi. Donc la différence entre phénomène et objet : objet est quelque chose qui est posé devant, qui est maîtrisé, qui est une forme de l’arraisonnement. Il n’y a d’objet que pour un sujet qui le pense. Phénomène a à voir avec quelque chose qui n’est pas maîtrisé, qui n’est pas forcé à comparaitre devant le tribunal de la conscience.

J. - En résumé : Phénomène, mais non au sens kantien. D. - Se démarquer par rapport à Kant ne va pas assez loin. Car même là où l’on emploie le mot d’objet pour dire ce qui vient en présence entendu comme ce qui se tient en soi-même, même là où l’on récuse l’interprétation kantienne de l’objectivité, on ne pense nullement déjà l’apparaître au sens des Grecs, mais au fond - bien que d’une façon très cachée - encore à la manière de Descartes : à partir du Je en tant que subjectum. Kant reste dans la position métaphysique, avec la notion d’objet et sujet. Et une autre pensée se présente : l’apparaître au sens des grecs. D. voudrait retrouver ce sens de l’apparaître, de laisser apparaitre qui est le mot d’ordre de la phénoménologie, retour à la chose même dans son apparaître. La chose : ce dont il est question dans son apparaître. Il l’objet « pour dire ce qui vient en présence entendu comme ce qui se tient en soi-même ». Si ça se tient en soi-même. Ça dit qu’être mondain, pouvoir faire venir un monde, c’est : tenue de rapport, rapport qui subjectivise au sens du bavardage quotidien qui a toujours déjà attribué places et lieux, temps pour, moment pour, forme, guise, une manière de cueillir et rassembler. Donc il n’y a pas d’objet en soi-même, ni de sujet en soi-même, ni de chose en soi même : il y a !cela donne, invite, appelle à y prendre part. Et tout ce qui vient est une in-formation, un procès de physis où je prends part en attribuant places et lieux, c’est une manière d’y prendre part, d’y être com-pris… ça ne dit rien de la chose ni de moi qui seraient déjà constitués… Nous ne sommes pas dans un monde d’objets ou de choses ; nous sommes traversées langagières de ce point de vue là. Dasein est mondialisant : il lui est donné la possibilité de faire être quelque chose qu’il appelle monde puisque dans sa façon de questionner, d’être toujours taraudé par cette question de qui ? Il n’est pas pris par ce qu’il fait, il est toujours dans un questionnement, dans une dimension de parole, de langage qu’on appelle conscience… Mais on en a fait un lieu.géographique. Cette question particulière qui fait que l’humain se pose la question de l’être, cet étant exemplaire qui a toujours à être, qui n’est jamais défini, être étant, qui fait qu’il appelle les choses et qu’il prend place puisqu’il n’est jamais pris dedans, il est toujours un écart. Le monde est une manière de se rapporter qui est propre aux humains, les allers et venues qui tissent une trame quotidienne. Pour l’animal il n’y a pas d’écart, il ne se pose pas la question de viser juste… L’abeille fait les alvéoles sans se poser la question des alvéoles. Etre abeille, c’est se comporter de cette manière-là. Alors que nous humains, nous pouvons faire des petites maisons et des grandes maisons… Les humains nous construisons tout un tas de significations pour nous démarquer, s’identifier… Le séminaire de Zagdanski est exemplaire pour mediter la fabrication qui est autre guise que lhabitation… la question du mouvement et de physis. Il requestionne l’apriori grec de Heidegger, par rapport à l’hébreux où les mots sont des mots-choses, des paroles choses… ce dont il s’agit et qui toujours échappent à l’emprise du concept raisonné. Il n’y a pas l’idée et l’objet, pas cette césure signifiant/signifié. Un passage sur la création du monde : l’idée de la Bible a été traduite en romain par création ( la genèse rabattue sur l’idée de création par Dieu), alors que le monde n’est pas créé par un super-humain (ainsi que l’on conçoit le dieu chrétien), il est une guise passagère, il est appelé, nommé… mais il n’est pas créé. Il n’y a pas un avant la création… L’estre (Wesen) à l’état pur du monde grec : Fédier traduit ce qu’on appelait essence par fervescence. Etre à la fois nommait un verbe ,estre , estrée de être, l’âtre, le rayonnement. Ça donne à voir et dire le séjour, l’habitation, l’atrium… et le mouvement, donc le déploiement à partir de l’être-même, tout autre qu’une stance. Alors que l’essence n’indique qu’une permanente immutabilité, quelque chose qui ne bouge plus,le plus général, alors que l’essence est volatile, évanescente... D’où le choix de ne plus traduire wesen par essence, car wesen a une dimension aspectuelle, demeurer séjourner, durer… autre que figer. Donc la chose qui apparaît de soi-même se fige… dans une in-stance alors que nous sommes dans une ex-tase, ex-tance. La tenue est rapport, pas un endroit où l’on se tient, pas un endroit qui fige, arrêté. Ça amène à cette question des appuis, sur lesquels on doit être, qui sont instables. rythmique de la présence... Les mots sont des paroles-choses et non des substances. Etude de la Tora… la pensée. Ça vaut tout le reste. Les paroles… les vertus d’Israël… ont quelque chose de divin, cela évoque la grâce divine, la bonté et le respect. Et en même temps il y a des zones d’ombres, échappées… Un mot peut avoir des acceptions dont l’un est le revers de l’autre, ça vient que les mots sont des paroles choses, traversées vibrantes et non des substances. Par ex la prière est la base, mais si elle attend une réponse de dieu elle est le fourvoiement de l’acte prière et de la méditation… Les paroles-choses visent au diapason de la pensée, qui traverse par l’étude… Etudier c’est résonner, vibrer… Alors que nous essayons de jouir de la maîtrise du concept bien arraisonné, pris dans les griffes du concept. Donc on est toujours à partir d’un je en tant que subjectum transitoire. L’objet est ce que j’ai jeté devant moi. Je le pose et je prétends le tenir, en avoir fait le tour, l’arraisonner. et par là "je" m’y fixe.

«  J. - Cependant, avec votre « non », vous donnez à entendre que vous-même, vous ne pensez pas non plus l’apparaître au sens grec… O. - Vous avez raison. De quoi il retourne ici est difficile à rendre visible, parce que cela demande un regard simplement libre. J. - Il est manifestement encore rare. Car habituellement on assimile sans trop y regarder votre détermination de l’apparaître à la détermination grecque ; et l’on tient pour établi que votre pensée a pour seul but un retour à la pensée grecque, si ce n’est même à la pensée présocratique, D. - Cette opinion est évidemment une sottise ; et pourtant elle a quelque chose de juste. J. - Comment est-ce possible ? D. - Pour pouvoir répondre à votre question avec toute la brièveté requise, j’aimerais risquer une tournure que guettent aussitôt une nuée de nouveaux malentendus ... J. - ... que vous pouvez pourtant tout aussi rapidement dissiper. D. - Certes, si par là ne se produisait un nouveau retard dans notre entretien, dont le temps est mesuré ; car vous voulez continuer demain votre voyage et aller à Florence. J. - Je suis déjà décidé à rester encore un jour ici, au cas où vous me permettriez encore une visite. D. - Rien ne peut m’être plus cher. Cependant, même sous ces heureux auspices, je dois ramasser la réponse en peu de mots. » Quand Heidegger se réfère à la question de l’être, il revient à la source grecque, l’origine de la culture occidentale pour lui. Zagdanski explique qu’Heidegger s’est fourvoyé dans sa lecture de la Bible, lue par sa traduction latine qui est celle de Luther qui ne connaissait pas bien l’hébreu. Comme toute traduction est une interprétation, Heidegger n’a pas été vigilant à ça, par rapport au texte d’origine (la bible Chouraqui par ex, la plus proche des paroles-choses). Le travail de la pensée hébraïque est de faire pulluler le texte, nourrir le foisonnement des contradictions qui témoignent d’une profondeur propre au parler/dire, alors que le travail de la pensée occidentale est de faire de la Bible un texte qu’on apprend par cœur… Là, il s’agit d’aller à la source grecque car notre source serait grecque. Le projet d’Heidegger n’est pas de revenir aux grecs, mais de questionner. En faisant cela, ça amène au sens de vérité, alètheia… Et ce n’est pas de dire que les grecs avaient raison et qu’on revient au moment des grecs… et être passéiste…

«  Car habituellement on assimile sans trop y regarder votre détermination de l’apparaître à la détermination grecque ; et l’on tient pour établi que votre pensée a pour seul but un retour à la pensée grecque… » Ramener à l’étonnement et à la source de ce qui était vérité, dévoilement et venir à l’apparaître, se montrer… du phénomène, justesse du Kairos, autre que adequatio intellectus et res. Le regard simplement libre : libre, qui libère, ouvre place et lieu, qui laisse la pensée à questionner. Nous ne sommes pas dans le libre à notre époque, nous sommes dans le d’accord/pas d’accord, nous sommes déjà dans l’opinion. il s’agit d’entendre les questions que ça pose, les questions que ça nous pose, l’inouï dit Fédier ; entendre l’insu-porté de la parole (Lacan), tout l’insu que porte la parole. Ça suppose ce regard libre qui fait que ce que je dis, je prends la mesure que je n’en suis pas l’auteur, que je suis traversée, que cette traversée m’a déjà frappé, coloré d’une certaine façon ; que mon regard n’est pas libre au sens de lménager l’ouverture pour être. Comme la taille des arbres : comment orienter… et je peux ouvrir cette orientation… mais comment ? Quoiqu’on dise, c’est une échappée, on ne peut pas l’attraper, nos paroles ne peuvent qu’esquisser une direction. Du coup toujours essayer d’ouvrir à ce que ça amène à penser… et du côté de la Grèce et du côté d’Heidegger… On peut le prendre par les grecs, mais aussi par l’hébreu comme le fait Zagdanski… ça chemine autour d’une manière d’habiter la parole qui produit quelque chose de particulier, qui est le propre des questions mystiques… tout autre que scientifique.

« ... que vous pouvez pourtant tout aussi rapidement dissiper.  » Comme si Heidegger pouvait rendre clair… et du coup en faire un concept, le rendre en pleine lumière… alors qu’Heidegger travaille sur la clairière. Donc jamais il ne va répondre à la question d’une manière facile ou simple, jamais il ne va éclairer, et dire qu’elle est la vérité. On ne peut que chercher ce qui toujours nous échappe. Je vais juste expliciter, déplacer l’ombre, et pas dissiper l’ombre et mettre en pleine lumière… Ramasser en peu de mots : ce qui ne veut pas forcément dire rapide… Et que veut dire rapide ? La durée de temps perdu ? le temps compris comme valeur monétaire calculable . Heidegger cherche à réouvrir le questionnement. On ne pourra jamais dissiper tous les mal-entendus, on ne peut presque que les préserver… Ce que fait l’hébreu, ce que fait l’herméneutique… Ex de la tora : profusion du texte, rendre complexe… texte et jaillissement de commentaires et aucun qui tranchent… et pas les règles de l’entendement des tables des catégories de la métaphysique… Il y a une autre manière de s’y articuler, d’y venir en présence. Il apporte cette idée qu’on n’a pas besoin d’avoir du temps en stock pour qu’on déplie, c’est sans fin. Tout revient à l’étude des textes, à la maison du commentaire… tout se ramène à s’incliner devant la générosité de logos, et d’être toujours dans la posture de cueillir rassembler… on s’y cueille, on s’y recueille… prendre forme… Et on n’est plus dans sujet/objet… et c’est ce qui est intéressant dans la gestaltung. Et comprendre cette notion du rapport.

J. – Qu’en est-il donc de votre rapport à la pensée des Grecs ? D. - Notre pensée d’aujourd’hui a pour tâche de prendre ce qui a été pensé de façon grecque pour le penser d’une façon encore plus grecque. J. - Et ainsi de mieux comprendre les Grecs qu’ils ne se sont eux-mêmes compris. D. - Cela, justement pas ; car toute grande pensée se comprend elle-même, c’est-à-dire se comprend soi, dans les limites qui lui sont sa mesure assignée, toute grande pensée se comprend elle-même le mieux. » «  ce qui a été pensé de façon grecque pour le penser d’une façon encore plus grecque » ouvre, quand on parle des grecs… comme quand Heidegger parle du judaïsme, il ne parle pas du peuple juif mais d’une manière d’être, qu’il qualifie comme ce qu’il appelle le judaïsme, cette dimension d’être arraisonné ; pour lui le judaïsme est une des figures la plus accomplie de la machenschaft, de la fabrication, du commerce. C’est l’oubli de l’être au profit de l’étant et d’un étant réduit à la quantité, au calculable. Il est pris dans les lieux communs antisémites de l’époque. Il faut dire aussi que les juifs étaient interdits à exercer certaines professions. Ils pouvaient exercer les professions du commerce. considérées comme viles ;; ;est ce cela qui a permis de les considérer comme voeleurs et pingres ? Dans la bible , le peuple juif est le peuple à part, et cela a été traduit comme le peuple qui se pensait au-dessus des autres. Alors qu’en hébreu, il est le peuple étranger, c’est-à-dire celui qui n’a pas de lieu géographique, et celui qui au sein de lui-même doit accueillir l’étranger. En hébreu, les juifs ne sont pas une ethnie, une "race", des caractéristiques… assignés à un lieu géographique… De ce point de vue-là, il est un peuple étranger. Donc le grec n’est pas lié à revenir à une population qui était exemplaire… mais à la manière Grècque de veiller la question d’être /étant… qui n’est pas liée au grec incarné… C’était une époque, une époque de l’étonnement. Parvenir à se laisser questionner et que ça nous révèle ce qu’on appelait Grèce, comment c’est possible de penser comme ça et à quoi ça nous expose... Comme avec un patient : la question n’est pas de changer la personne, c’est de chercher la portée, la limite de ce qu’il met en œuvre, qu’est-ce que ça permet... Et toute manière est une forme d’existence qui amènera bien son ensuite, qui sera plus ou moins couteux, plus ou moins confortable, plus ou moins favorable à l’existence . Mais en aucun cas, je ne pourrai décréter que c’est bien ou mal. Aller vers la pensée grecque, revenir au fondement grec vérité, nous amènerait à questionner ce qu’est alètheia… et peut-être préserver la question.

« J. - Que signifie alors : penser de façon plus grecque ce qui a été pensé de façon grecque ? D. - Portant regard sur le déploiement de l’apparaître, cela se laisse bien élucider. Quand la venue en présence elle-même est pensée comme apparaître, alors règne dans la venue en présence le venir-en-avant dans l’éclairci entendu comme ouvert sans retrait (Unverborgenheit). L’ouvert sans retrait se laisse voir dans le désabritement entendu comme éclaircir. Mais cet éclaircir lui-même, il demeure à tous points de vue impensé en tant qu’éclair . » On a essayé de penser l’éclaircie comme là où il y a la lumière, comme là où il y a le noir, le jour par rapport à la nuit, alors que le jour est autre que la nuit, il n’est pas l’envers ou l’opposé de la nuit. Du coup il faut entendre l’éclaircie comme un éclair, pas de l’ordre d’un quelque chose… moment opportun, la décision… La décision n’étant pas de décider un quoi, c’est l’acte même, tenue d’un rapport, qui nous appelle à prendre place et part… Eclaircir un acte, jamais un quelque chose qui est éclairé. Cet éclaircir lui-même est impensé en tant qu’éclair, fulgurance. C’est-à-dire que ce n’est pas moi qui éclaire, c’est y prendre part, s’étonner… d’en être partie prenante… (Livre : Le son des ténèbres)

« S’engager à penser cet impensé, cela veut dire : entreprendre plus originalement ce qui a été pensé de façon grecque, le prendre en vue dans sa provenance. » Engagement, prendre un chemin, arpenter, ce n’est pas conceptualiser. Il y va de sa propre peau, s’y exposer, avoir l’audace de ça. Nous sommes dans une époque où il n’y a plus d’audace, s’exposer sans savoir à quoi/qui on s’expose. On cherche toujours la sécurité. Le prendre en vue dans sa provenance, dans sa venue… pas dans quelque chose qui a eu lieu. Revenir aux grecs, ce n’est pas aller dans un passé posé, mais aller vers quelque chose qui nous parle à nouveau frais. Ça vient à l’avant de nous. C’est la question du dieu chez les grecs, les hébreux… Zagdanski dit que le Dieu n’est pas né, mort… mais un Dieu à venir au moment favorable. … il viendra. Si tu l’appelles, il viendra. Ça évoque faveur de monde, provenance. Ce n’est pas une cause qui serait derrière nous, qui serait déjà passée. Mais quelque chose qui ne peut que surgir. Donc s’engager, et pas dans les traces de quelqu’un : c’est frayer des nouveaux chemins. Le prendre en vue en propre, cet inouï, provenance : c’est être requis, s’y laisser appeler et y aller en propre, il y va proprement de soi, pas d’un sujet, question d’existence… ce n’est pas de dire ton opinion… Il s’agit de s’y accorder. Ex manger ensemble : ce n’est pas que chacun mange son plat mais qu’ensemble nous composons le repas et chacun s’y accorde. Ça se traduit dans les simples gestes. Qu’est-ce qui se passe ? C’est au-delà de ton idée et mon idée. Il y va du monde, de l’humanité, d’une urgence, d’un péril…

« A sa manière, ce regard est grec, et pourtant, quant à ce qu’il aperçoit, il n’est plus, ne peut plus jamais être grec. J. - Mais alors quel est-il ? D. - Pour cette question, me semble-t-il, nous n’avons plus aucune réponse à notre disposition. Elle ne servirait d’ailleurs à rien, dans la mesure où il ne s’agit plus que de ceci : apercevoir en sa provenance même l’apparaître comme déploiement de la venue en présence. » La question n’est pas de trouver une réponse mais de se laisser éprouver/faire l’épreuve de Laisser s’engager de telle sorte que quelque chose de l’ordre de la « grâce divine » nous touche. Que ça nous vienne, que l’on puisse apercevoir dans sa provenance, dans quelque chose qui est toujours dans une générosité, toujours un devancement, qui nous échappe toujours, l’apparaître comme déploiement comme une venue en présence, en un éclair. Certaines dispositions, certains moments où les moments de grâce, où quelque chose comme ça nous apparait. Donc c’est une disposition, une posture, pas un quelque chose.

« J. - Si cela réussit, alors vous pensez l’apparaître à la fois de façon grecque et d’une façon qui n’est plus grecque. Vous disiez - du moins en est-ce l’esprit - que le domaine de la relation sujet-objet est abandonné si la pensée s’engage dans l’épreuve dont il vient d’être parlé et dans laquelle la provenance de l’apparaître elle-même apparaît (mais nous est-il permis de dire ainsi ?). » Il s’agit d’une épreuve, une traversée, ce n’est pas une question de conceptualiser. Donc penser n’est pas rendre compte de conceptualiser, calculer. « D. - Difficilement. Mais vous effleurez quelque chose d’essentiel. Car dans la provenance de l’apparaître vient à l’homme ce en quoi s’abrite la duplication de la venue en présence et de ce qui vient en présence. J. - La duplication, bien que voilée en tant que duplication, s’est déjà, en son temps, offerte à l’homme. D. – L’homme prête écoute, en tant qu’il est homme, à l’annonce de cette offre. » C’est ça l’entrée en présence. La duplication est cette tension être étant. Car dans notre culture, on est toujours en train de chercher la cause. Il dit « L’homme prête écoute, en tant qu’il est homme, à l’annonce de cette offre. » Cette possibilité d’être s’offre à lui. Et l’être requiert l’homme pour que cette annonce, cet appel à être, prenne forme d’un étant, par l’entrée en présence qui pose homme et ce auprès de quoi il se tient. Donc il prête écoute, il prête l’oreille… Et le fait qu’il soit humain, il reçoit l’appel d’être, il est appelé à être, à prendre place, part. C’est duplication : il est à la fois au sein de l’étant, mais n’est pas réductible à l’étant puisqu’il lui est donné à pouvoir être encore. Il est encore appelé à être… dite… dire… Tous ces rapports-là. La duplication est ce qu’on pourrait appeler la différence ontologique être étant, mais c’est un pli. Soit on essaie d’expliquer l’être : métaphysique, soit on accepte que quelque chose est toujours une tension… On tourne sans cesse…


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