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Médard Boss et la Daseinsanalyse. Présentation.


Médard Boss et la Daseinsanalyse Présentation par edith Blanquet

En 1885 nous assistons à l’avènement de la psychanalyse. En 1927, paraît « Être et temps ». Nous avons là deux conceptions de l’homme : La psychanalyse, tout en donnant à la parole du patient une place nouvelle, nous propose une conception topique de l’être humain. Elle formule l’hypothèse de la construction d’un appareil psychique et nous propose des stades du développement de celui-ci. Elle va considérer la pathologie comme une décompensation de cette structure psychique. La Daseinsanalyse va y « ajouter « l’expérience de deux existences : cela signifie que patient et thérapeute se trouvent tous deux aux prises avec la question de l’existence, c’est-à-dire une même question. Cette même question prendra des formes différentes pour chacun des deux existants. Ainsi l’analyse dont il est question avec la Daseinsanalyse sera celle de l’existence de l’homme, la manière dont il est concerné par la question de son être. La pathologie sera ici considérée comme pathologie de la liberté, difficulté à mettre en œuvre un pouvoir être.

Mais de plus, la conception du Dasein, être-le-là, de Heidegger va nous conduire à penser l’existence et par là à méditer ce qu’il en est d’une possible anthropologie : il propose une analytique du Dasein qui nous conduit à quitter les rives sécurisées d’une anthropologie psychanalytique pour aborder l’ouvert d’une série de questions, variations de la question essentielle pour l’existant : son rapport à l’être. La manière dont l’humain se tient en rapport à la question de l’être se nomme existence. Être humain cela veut dire avoir à être soi-même, être ouvert pour des possibilités d’être qui prennent forme quotidienne de comportement.

La Daseinsanalyse s’inspire de la phénoménologie qui constitue sa méthode c’est-à-dire une manière particulière de questionner et de soutenir une explicitation (et non une explication) du phénomène de la présence humaine. Le Daseinsanalyste s’appuie donc sur la phénoménologie et, également, ainsi que Médard Boss le rapporte dans les séminaires de Zollikon (traduit « Séminaires de Zurich »), il doit apprendre à s’éprouver lui-même comme Dasein. Le Dasein est cette conception particulière de l’être humain que nous propose Martin Heidegger et qui vise à expliciter les manières dont nous endurons cette question de notre avoir à être nous-mêmes. En cela, penser l’homme comme Dasein ne propose pas de nous dire ce qu’est l’homme (anthropologie) mais nous ouvre aux déclinaisons de cette question qui ne nous laisse pas en paix : être ? Qui ? Comment ?

À côté de la psychanalyse et de la Daseinsanalyse, nous assistons à un développement de plus en plus grand des approches dites scientifiques dans le domaine de la psychiatrie et de la psychothérapie et ce dans la sillage des travaux des sciences biologiques avec notamment la neurobiologie. L’illustration la plus frappante dans le domaine clinique en est le DSM ! Cela veut dire que le développement de la psychiatrie va s’appuyer de plus en plus sur un traitement statistique des symptômes et un traitement chimique pour un homme désormais neuronal ! Ce qui nous expose au péril d’oublier ce qui est le propre de l’homme à savoir qu’il est un être humain, c’est du moins une telle pensée qu’il importe de préserver. Dire cela c’est insister sur la dimension globale de la présence humaine et sur le risque que comporte son étude sur le même mode que les sciences de la nature à savoir un découpage en termes de symptômes ou autres parcelles perdant de vue le vivre lui-même. L’existence concerne un être humain ouvert pour des possibilités globales et inextricables d’être-au-monde et en cela elle ne peut se réduire à la production de neuro-transmetteurs au sein d’un cerveau ! Cela signifie que l’approche de l’être humain, et de sa souffrance, requiert une méthode autre que celle des sciences de la nature. C’est en cela que la philosophie devient une manière de penser l’humain qui peut nous être d’un grand secours à nous Gestalt- thérapeutes. Le style d’existence et le projet de monde qui est le propre de l’être humain ne sont pas réductibles à la quantification que nous proposent les méthodes des sciences naturelles. Le Gestalt-thérapeute s’intéresse à la structuration de l’être-au-monde c’est-à-dire la spatialisation et la temporalisation de soi, autrement dit les formes de la présence. C’est en ce sens que la traduction de textes tels que ceux de Médard Boss nous semble indispensable pour nous tenir en éveil et travailler nos fondements !

Médard Boss est né le 4 octobre 1903 à Saint-Gall et mort le 21 décembre 1990 à Zollikon en Suisse. Docteur en psychiatrie, il exerça à la clinique de Zurich. Il fut élève de d’ Eugen Bleuler, de Freud et ami de Heidegger ; il collabora également avec Carl Gustav Jung. Il découvre l’ouvrage « Être et temps » ( Gallimard, Paris 1986, 590 pages) de Martin Heidegger alors qu’il est médecin militaire. Il est frappé par la façon dont ce philosophe parle de la sollicitude devançante (§ 26 de cet ouvrage) qui définit pour lui ce que la relation thérapeutique doit être. C’est ainsi qu’il écrit à Heidegger qui lui répond. Ils vont alors se rencontrer en 1949 et développer une relation d’amitié nourrie d’échanges concernant l’existence et la souffrance humaine. Médard Boss est considéré comme le psychiatre le plus proche de la pensée de Heidegger. Il a produit une œuvre de clinicien nourrie de ses échanges avec Heidegger. Notamment un ouvrage non traduit : „Grundriss der Medezin, Anzätze zu einer phänomenologischen, Physiologie, Pathologie,Therapie und zu einer daseinsgemässen Praeventiv-Medezin in der modernen Industrie-Gesellschaft „ Verlag Hans Buber, Wien, 1971. Cet ouvrage consiste en un travail de fondation de la médecine, de la physiologie, de la pathologie et de la thérapie dans la perspective du Dasein et il a été écrit en étroite collaboration avec Heidegger.

Il existe quelques ouvrages traduits en français dont : « Un psychiatre en Inde », Fayard, collection l’expérience psychique, paris, 1971, 245 pages « Introduction à la médecine psychosomatique », Presses Universitaires de France, Paris, 1959, 185 pages. « Psychanalyse et analytique du Dasein », Vrin, Paris, 2007,131 pages. « Il m’est venu en rêve », PUF collection psychiatrie ouverte,Paris 1989,256 pages Malheureusement la plupart d’entre eux sont quasi introuvables car non réédités. Il fut à l’initiative des « Séminaires de Zollikon » que se dérouleront entre 1959 et 1969, dans sa maison de Zollikon ( traduits « Séminaires de Zurich » par Caroline Gros, Gallimard, Paris, 2010, 405 pages) : il s’agit là d’un groupe de travail réunissant un groupe de psychiatres autour de Heidegger avec pour projet de penser la pathologie à partir de la pensée de l’être humain comme Dasein. Il fut aussi avec Ludwig Binswanger et Roland Kuhn celui qui créa en 1971 à Zurich l’institut de Daseinsanalyse pour la psychothérapie et psychosomatique. Les articles que nous avons traduit vous proposent des textes inédits en France. Les traductions paraitront sur ce site au fur et à mesure de leur traduction.


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