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Compte-rendu N°14

lecture des pages 132 à138


GROUPE lecture de Carcassonne de Décembre 2012. Séminaire de Zurich/Zollikon. Heidegger. Edith BLANQUET- Yannick MARQUEZ- Marie SARDA- Marie Christine MISTRAL- Guy MINAUDIER-Denis TOUZET Ce soir lecture du séminaire du 11 mai 1965 pages 132 à 138 Heidegger débute ce séminaire en abordant le phénomène du corps. Et pour cela il cite NIETZSCHE Edith nous rappelle que Nietzsche a fait tout un travail sur ce qu’il appelle « la grande santé » qui a chez lui, à voir avec la puissance. Pour Nietzsche, la puissance serait liée à l’état de grande santé… c’est l’exaltation du corps biologique. C’est en prenant appui sur cette pensée de Nietzsche que Heidegger va ici esquisser une autre façon de penser le corps non plus dans sa dimension exclusivement biologique, vivante, mais comme phénomène que nous nommerons « Corporer » (au sens de Heidegger). Nietzsche se situe dans le courant des « vitalistes »--- une philosophie du vivre---- le vivant qui se soucie de sa puissance. Il maintient le dualisme corps/âme, il présuppose que le corps est Déjà compris alors que Heidegger va interpeller le phénomène du corps, le phénomène du corps étant différent du problème du corps. Chez les vitalistes nous pouvons dire que le corps ça ne pose pas question, il est compris comme l’est ce qui nous est le plus évident. La démarche phénoménologique vise à revenir au plus près de ce que l’évidence nous donne à entendre et qui s’oublie dans l’évidence même. Le corps n’est donc pas aussi intelligible et clair que le dit Nietzsche -et pas que lui !-…c’est un phénomène que nous ne prenons pas en vue car il semble aller de soi. Or le corps pour un existant cela nous demande un travail de pensée méditante. Le phénomène est selon Heidegger : l’être corporel. Le propre du Dasein c’est d’être corporel . C’est une manière d’être, une manière de se rapporter à l’être. Heidegger va donc ici déplier une manière de tenir la question de l’être et de s’interroger sur la façon dont le corps cela nous concerne et requiert : nous sommes corporels c’est-à-dire ? Rappelons que là le corps en question n’est pas saisissable par la voie de l’explication : lorsque nous décrivons de corps, le décomposons en divers organes nous perdons de vue le phénomène d’être corporel.

Le Dasein emporte avec lui toutes ses directions et le Dasein n’est pas que corporel au sens où il serait une substance pondérable et matérielle. Il est spatial en tant qu’il fait espace car le Dasein est un « pouvoir être » ; c’est : être toujours auprès de ...Être spatial c’est avoir ouverture pour pouvoir se situer parmi les autres, cela ne signifie pas avoir une dimension comme celle de la masse d’un corps. Nous laisser entendre le phénomène du corps c’est entendre l’espace comme forme de la proximité : je suis auprès de. Pour Heidegger le corps n’est pas un avoir mais plutôt une manière d’être … à la fois une manière d’être situé et une manière d’être affecté … et ce , toujours en même temps. Le corporer est une forme de la présence humaine, une façon dont nous prenons en charge la présence d’être, et c’est le mouvement qui va créer l’espace et qui va rapprocher c’est-à-dire situer auprès de et ce indépendamment d’une distance métrique. La possibilité de mesurer requiert plus essentiellement le pouvoir d’espacer. Cela nous renvoie à la question du « contact »- car dans sa manière d’avoir à être, le Dasein est toujours : près de. Et c’est à même cette proximité (être-avec-autrui/ être-au-monde) que le Dasein peut distinguer / espacer un lui-même et un autre. Pour assimiler ce concept, Il nous faut nous sortir de l’idée que le corps est un outil, et réaliser que le corps est une manière d’être c’est-à-dire que c’est ainsi que nous sommes au-monde : corporel/ corporant ; corporer c’est pouvoir se rapporter à ce qui est ; cela fait être un monde, un réseau de proximité dans lequel les choses prennent place et moi-même . Nous avons perdu le mouvement et le « sentir » lorsque nous pensons le corps comme un objet ou un quasi-objet et nous sommes resté sur la matière, le pondéral ; ce que nous pouvons mesurer. Cela parce que nous nous occupons de ce qui est présent et non de la présence, de ce qui permet que un présent soit : son pouvoir être. Nous pourrions définir le Dasein comme : un humain qui se rapporte à la question du : « comment je peux être ? » Le dasein est un rapport, c’est se rapporter à la question : Qui je peux être ? C’est une tenue de ce rapport - pouvoir être/ compréhension de l’étant- , c’est une forme , c’est toujours en train de se faire. Et ce rapport à être a une finitude, celle du vivant que nous sommes à chaque fois nous-mêmes . Nous sommes toujours sensibles … intonés…

Le Dasein est spatial au sens ou il fait espace . Etre humain s’est espacer, toujours distribuer des places et lieux .C’est faire espace à l’espace : ce auprès de quoi nous in-formons notre site, c’est à dire aménager un espace et pas seulement circonscrire une surface métrique . Et c’est par la corporéité que le Dasein spatialise. La mesure, l’espace géométrique est un dérivé quotidien de notre pouvoir être spatial. La spatialité est un existential c’est-à-dire un caractère d’être et non la propriété d’un étant.

Ce qu’il convient d’entendre par Spatial : L’existential c’est un caractère d’être.. L’espace n’est pas une caractéristique géométrique mais une manière de se rapporter à, une manière d’être. Ainsi le Dasein est fondamentalement être-au-monde. ESPACER il faut l’entendre comme un pouvoir être .., une ouverture d’être qui éclate en place et lieu – lieu non topographique mais lieu d’habitation d’un monde : possibilité de me comporter c’est-à-dire porter avec/ auprès de. et en place – qui ouvre la proximité de.. qui ouvre le : près de … C’est l’être humain qui « fait naître » l’espace, l’être humain : prendre place et lieu . C’est le corps qui « crée » un lieu commun et le lieu, c’est là où il y a rapport. Espacer c’est « Pouvoir être » qui donne place et lieu – Etre-au-monde c’est toujours « auprès de » donc c’est « déloigner » ( supprimer le lointain ) Espacer c’est se situer dans la proximité, un espace/rapport où je suis le plus souvent.

La corporéité, c’est une façon d’être corps, ce n’est pas avoir un corps qui viendrait s’ajouter à un avoir psychique. Le Dasein est spatialisant, c’est à dire qu’il est ouverture d’être pour que prenne place et s’aménage un monde, un réseau de conjointures, les étants avec lequel nous commerçons quotidiennement. Le Dasein fait « être » l’espace, et le monde en tant qu’il est spatial ,.. c’est un pouvoir être .

Puis pour nous rapprocher du phénomène du corps Heidegger se rapporte de nouveau au texte de Hegglin qui expose trois manières de rougir du visage – rougir de honte- rougir de fièvre – rougir de passer de la nuit glaciale à l’ambiance chaleureuse d’un refuge chauffé. Ces trois manières de rougir sont directement discriminées, nous les connaissons, nous les identifions sans avoir à réfléchir. Connaître c’est aussi éprouver. Cependant de quoi parle -t-on quand on parle de rougeur ? (ou de larmes – puisque Hegglin fait le même raisonnement avec les larmes et l’affliction .) Nous sommes ici en face de 3 phénomènes différents et nous savons -ici- discriminer et ce, sans mesurer la quantité de liquide qui coule …. et on peut mesurer un liquide mais pas des larmes On navigue ici entre phénoménologie et discours scientifique … des larmes on ne peut pas retirer la honte…ou la douleur ou la joie ..

Regardons le phénomène de l’affliction et de la douleur. Avoir corporellement mal et ressentir l’affliction de la perte d’un proche sont deux douleurs et Heidegger pose la question : ces deux douleurs sont elles psychiques ou somatiques ? ? ? Il ouvre ici la pensée phénoménologique : Rappelons-nous le Tétralemme :
  une chose est
  une chose n’est pas
  une chose est et n’est pas
  une chose , ni elle est , ni elle n’est pas C’est le début de l’époché ( du grec Pyrhon )

Peut on mesurer la profondeur d’une affliction ? ? ? La profondeur d’une affliction serait une disposition (plus ou moins intense) à …. Ressentir cette affliction, et nous pourrions parler alors d’intensité de cette affliction. Cette notion de profondeur de l’affliction n’a donc rien de métrique, tout comme n’a rien de métrique la « profondeur de cette salle ici expérimentée dans l’être au monde » . Si je peux estimer, mesurer une distance physique entre deux corps, en aucun cas je ne peux mesurer la profondeur « qui s’espace et se fait espace chaque fois avec mon être au monde. » On parle bien ici d’une intensité … et ce qui se montre dans une affliction c’est comment un être humain est requis et comment son rapport-au-monde et à-soi en est modifié. Si je suis triste , non seulement je suis triste, mais le monde – aussi- est triste.

Puis Heidegger nous propose de regarder les différents sens que peut prendre le mot « avec ». Quand je dis : je vois « avec » mes yeux et je prends « avec » ma main. Le « avec » est différent, il n’a pas le même sens, il n’est pas utilisé de la même manière. Il s’interroge ensuite sur la différenciation entre vision et saisie et reprend toutes les manières de « penser » les sens, et conclue que si le toucher est un sens rapproché et la vision un sens du lointain, saisir et voir sont donc lié au rapport à l’espace…Aussi reprenant sa phrase du début de ce séminaire Heidegger se demande comment le corps fait avec ça ? Le propre du Dasein étant d’être corporel, comment le corporel se comporte avec l’espace ?

S’instaure alors un dialogue entre l’un des médecins participants et Heidegger qui affirme, contrairement à son interlocuteur, que : le corps est ce qu’il y a de plus loin dans l’espace. En effet, quand on ressent une douleur dans le dos, une douleur irradiante par exemple, on ne peut en aucun cas cerner les bords de la douleur, la douleur n’est pas une surface… Cependant quand un profane (non expert en anatomie / physiologie du corps physique) dit : « j’ai mal au dos » il est vraisemblablement plus proche du phénomène de la douleur que le médecin, qui lui affirme « c’est cela qui vous fait mal » qui localise la douleur. Par cet exemple Heidegger nous amène à penser que le corps est autre chose qu’une simple entité métrique, et il revient alors (cercle herméneutique) sur le « rendre présent » pour nous définir le « corporer » comme « rendre présent ici ». Il faut quelque chose du « corporer » pour que la gare centrale de Zurich soit présente ici quand nous la nommons. Il faut quelque chose/ un acte de « corporer » c’est à dire quelque chose qui fait appel à un éprouvé, à une expérience corporelle. Quelque chose qui a pris corps en moi avant – toujours déjà : facticité du Dasein-,quelque chose que j’ai déjà éprouvé. Heidegger continue son questionnement : « Comment mon corps est-il en jeu quand je me rends quelque chose présent ? Pour autant que je suis ici, quel rôle le corps joue-t-il dans cet être ici ? Où est l’ici ? quel est le rapport phénoménal dans lequel l’ici se tient à l’égard de mon corps ? » Pour l’interlocuteur, l’ici est où son corps est. Heidegger reprend le « ici », la question importante dont il s’agit alors est : comment le corps se rapporte à l’espace ? ? Il y a toujours un « espacer ». Mon corps n’est pas là comme le seraient des chaises empilées les unes sur les autres, en aucun cas je ne peux être « empilé » sur ces chaises, et pour mon corps l’espace s’aménage autour de lui. Mais alors Où le corps finit-il où s’étendent ses limites ? Heidegger entend bien le présupposé du corps sans limite et il amène son interlocuteur à penser ce qu’il dit. Que dit-on quand on parle de « portée corporelle » ? Est-ce la portée de ma main ? Sa capacité à atteindre quelque chose ? Et avec son exemple de Thalès chutant dans un trou, Heidegger nous amène à entendre que « Corporer » n’a rien à voir avec être ou avoir un corps, mais bien une manière de se rapporter à ..


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